L'Histoire de la Biscuiterie Jeannette | De 1850 à 2024

DÉCOUVREZ L'HISTOIRE DE LA BISCUITERIE JEANNETTE

L'histoire d'une biscuiterie normande née en 1850 qui connaîtra la pénurie, les bombardements, la reconstruction, les reprises, la liquidation et surtout l'attachement de ses salariés et clients fidèles.

CRÉATION DE LA BISCUITERIE MOLLIER

DE 1850 À 1927

La longue histoire de la Biscuiterie Jeannette commence avec la création de la Biscuiterie Mollier en 1850, à Caen, spécialisée dans la fabrication de petits fours et de sablés normands.

Présente dans de nombreux concours culinaires, elle remporte notamment la médaille d’argent à l’Exposition Universelle de Paris en 1900. Jusqu’en 1914, l’usine Mollier fait travailler 10 ouvriers spécialisés dans la fabrication et 8 femmes pour la manutention et le conditionnement. Les biscuits, réputés pour être des “biscuits de luxe", sont vendus au 205 rue Saint-Jean, proche de l’usine.

Pendant la période 1914-1918, la biscuiterie tourne au ralenti du fait de la pénurie de main-d’oeuvre masculine mobilisée sur le front de la guerre. Ce sont les femmes qui doivent s’occuper de la production.

ARRIVÉE DE LUCIEN JEANNETTE

DE 1927 À 1939

En 1927, Lucien Jeannette reprend la Biscuiterie Mollier et la baptise Biscuiterie Moderne du Calvados. La production de la biscuiterie se diversifie : gâteaux secs, croquettes aux amandes, galettes de Caen, boudoirs et sablés.

Le jeune Lucien Jeannette bénéficie de la confiance des anciens clients de la Biscuiterie Mollier et envoie des voyageurs de commerce dans toute la France.

En 1930, Lucien Jeannette se lance dans la production de madeleines, spécialité de Commercy jusqu’ici. L’introduction de la fabrication de la madeleine en Normandie est une véritable innovation.

À cette époque apparaît l’image de la laitière normande, sa canne à lait sur l’épaule, arpentant un chemin de terre entre mer et campagne. Des scènes de campagne évoquant le Pays d’Auge complètent la vision idéale que veut donner Lucien Jeannette de la Normandie.

SECONDE GUERRE MONDIALE

DE 1939 À 1944

Pendant l’occupation la Biscuiterie Jeannette connaît une époque difficile à cause de la pénurie et des restrictions imposées. Les matières premières comme la farine, le beurre ou le sucre sont rationnées.

Victime des bombardements en Juin 1944, l’usine Jeannette cesse toute activité : 25% des bâtiments sont sinistrés et les Allemands pillent le stock de marchandises.

Ces dégâts n’empêchent pas Lucien Jeannette de se porter volontaire auprès de la Défense Passive pour venir en aide aux victimes. La camionnette de la biscuiterie est utilisée pour se faufiler sous les bombes pour dégager les blessés et les cadavres. Lucien Jeannette a aidé au déblaiement de 85 morts et au soin de 1455 blessés.

RECONSTRUCTION DE L'USINE

DE 1944 À 1951

Après la guerre, Lucien Jeannette va se démener pour reconstituer le stock et relancer la production.

L’activité commerciale reprend dès Janvier 1945 mais il faudrait deux années pour remplacer le matériel. De 1947 à 1950, le matériel se reconstitue peu à peu.

En 1950, la Biscuiterie Moderne du Calvados commercialise avec succès la “Galette de Caen, le “Petit Normandy” et les madeleines.

Lucien Jeannette, usé par tous ces efforts, décide de passer la main. N’ayant pas d’héritier, il décide de vendre aux frères Vinchon. Le 21 octobre 1951, la page de l’époque Jeannette est tournée.

LA JEANNETTE

SEULE ENFANT DE LUCIEN JEANNETTE

Lucien Jeannette n’a jamais eu d’enfant. La laitière normande, portant une canne en cuivre remplie de lait, sur fond de paysage champêtre, c’est la “Jeannette”, comme disent familièrement employés et clients. Elle représente tout à la fois : l’usine et son symbole.

Évocation idyllique d’une Normandie traditionnelle, la petite Jeannette s’est adaptée en 50 ans. Aujourd’hui sa coiffe s’est arrondie et seul son buste est représenté mais l’essentiel de son look est toujours identifiable. Les salariés d’aujourd’hui tiennent à ce symbole comme au nom Jeannette, c’est ce qui représente pour eux l’identité de la Biscuiterie Jeannette.

PRODUCTION À GRANDE ÉCHELLE

DE 1951 À 1975

Les frères Vinchon lancent l’entreprise dans la production industrielle à grande échelle de madeleines. La pâte jaune nécessite un autre type de fabrication, de conditionnement et de stockage que les biscuits secs.

La logistique se développe considérablement et le développement se fait par bonds successifs. D’une quinzaine de personnes en 1950, l’usine atteint le nombre de 240 salariés en 1985. L’usine Jeannette profite de l’ouverture des marchés grâce à la prolifération des grandes surfaces. Une mécanisation de la chaîne augmente la productivité.

Le transport des marchandises joue un rôle très important. Avec une flotte de 44 camions, la famille Vinchon apporte la garantie d’une distribution de madeleines fraîches dans les meilleurs délais sur l’ensemble du territoire. De plus, cette flotte apporte une part de publicité non négligeable.

INVESTISSEMENTS & MODERNISATION

DE 1975 À 1986

À partir de 1975, c’est l’époque des investissements et de la modernisation du site. À son apogée, la Biscuiterie Jeannette dispose de deux usines, l’une située route de Falaise à Ifs et l’autre rue de la Marne à Caen, qui est aussi l’adresse du siège social. L’effectif moyen est de 300 personnes. Les deux usines sont dotées chacune de quatre fours de fabrication, de machines de conditionnement et d’une fardeleuse. Celle de la route de Falaise est équipée en plus d’une enrobeuse chocolat.

Grâce aux efforts marketing, la biscuiterie s’impose comme le leader international de la pâte jaune. L’entreprise est présente dans 66% des hypermarchés, 60% des supermarchés, 46% des supérettes et 20% des petits commerces avec 27 références de produits.

ANNÉES 80 : APOGÉE DE LA BISCUITERIE JEANNETTE

Une production de 15 000 madeleines à l’heure pour 45 à 50 tonnes de biscuits par jour. Les produits de la Biscuiterie Jeannette sont exportés dans 9 pays.

RACHATS SUCCESSIFS

DE 1986 À 1997

En 1986, les frères Vinchon cèdent l’affaire au groupe Brossard. L’année suivante, Victor Scherrer devient PDG du groupe avec la volonté de devenir leader sur le marché de la pâtisserie industrielle. Le choix est fait de développer les marques les plus fortes et les secteurs les plus rentables.

Des restructurations sont menées et touchent l’usine Jeannette avec le licenciement en 1992 de 57% de l’effectif. La famille Vinchon décide de retirer la Biscuiterie Jeannette du groupe.

En 1994, la société revient dans le giron familial avec Francis Vinchon pour PDG. Cependant, elle sera rachetée quelques mois plus tard par le groupe Cartelot qui évince Francis Vinchon. Finalement, la production du groupe est recentrée dans le Nord et la Biscuiterie Jeannette est liquidée en 1997.

SITUATION FRAGILISÉE

DE 2001 À 2013

En 2001, Jean-Claude Cherrier reprend la Biscuiterie Jeannette. Il réalise d’importants investissements afin de remettre les machines en route et de convaincre les clients méfiants qui exigent d’être payés avant la livraison des produits.

En 2003, c’est une moyenne de 20 tonnes de madeleines qui sortent quotidiennement des lignes de production. La situation financière est très délicate et l’entreprise restera extrêmement fragile jusqu'en 2013.

COMBAT DES SALARIÉS

DE 2013 À 2024

En 2013, la Biscuiterie Jeannette est liquidée et les salariés sont licenciés. Ces derniers occuperont l’usine pendant 344 jours afin d’éviter la vente aux enchères des outils de production.

Une vaste campagne de financement participatif est lancée. Grâce au combat des salariés et à la médiatisation de cette lutte, le financement rencontre un franc succès et la Biscuiterie Jeannette est sauvée.

En 2014, Georges Viana reprend la Biscuiterie Jeannette. Les nouvelles madeleines Jeannette font leur apparition et se vendent même en ligne. En 2017, le site de production se déplace à Colombelles et l’entreprise est labellisée EPV (Entreprise du Patrimoine Vivant).

En 2019, André Réol, un caennais d’origine âgé de 87 ans, et Benoît Martinet reprennent la Biscuiterie Jeannette. Les 25 salariés de l’entreprise sont très attachés à la qualité des produits qui fait la renommée de toute une région.